Le jeu, une méthodologie éducative à part entière ?

23 mars 2022 par Manuel Duperthuis

Et si le jeu était une manière d’enseigner différente, s’il avait toute sa place dans les apprentissages tout au long de notre vie.

Notre questionnement va nous emporter dans le temps, de Rabelais à aujourd’hui, et éveiller nos consciences sur une démarche pédagogique réfléchie.

© yanngautreau.fr

Une question sans cesse renouvelée

Bien souvent, le jeu se fait rare après l’école primaire. 

Et pourtant, de nombreux travaux de recherche éclairent la place prédominante du jeu dans l’apprentissage. Le statut d’enseignant ne doit pas être un obstacle à jouer en classe : tout le monde n’est pas joueur mais l’impact positif du jeu sur la motivation, la connaissance de soi et de ses compétences convainc généralement de tenter l’expérience. 

Jeux de cartes, de plateau, de rôle peuvent servir de levier aux apprentissages et sont des outils efficaces dans une approche de l’enseignement orientée vers le développement de soi et des compétences. 

Des initiatives remarquables existent et ont été prises dans différents niveaux de systèmes éducatifs : « jouer à l’école » est donc de plus en plus crédible, et, plus qu’une problématique, apparaît comme une véritable nécessité pour les enfants de tout âge (pour aller plus loin, lire notre article de blog sur l’interview de Philippe LEPINARD enseignant chercheur en sciences de gestion à l’IAE de Créteil).

Quelques repères sur le jeu à travers le temps

En France, le jeu se définit comme « une activité physique ou mentale dont le but essentiel est le plaisir qu’elle procure ». 

De part cette définition, le jeu a-t-il alors toute sa place au sein d’établissements éducatifs dont la nécessité est de travailler ?

Pour les Anglos Saxons, le jeu se définit en deux notions qui sont interconnectées : Play et Game. 

On pourrait interpréter Play par jouer sans contraintes dont l’issue n’est pas connue et Game comme un moment encadré et dont l’issue met en lumière un gagnant, un perdant, un projet….

De ces courants est née l’éducation nouvelle, un courant pédagogique qui défend le principe d’une participation active des individus à leur propre formation et, bien plus qu’une accumulation de connaissances, l’apprentissage doit être un facteur de progrès global de la personne.

Les scientifiques du début du 20ème siècle ont permis de développer plusieurs théories justifiant le recours au jeu (Ottavi 2009) mais aussi des psychanalystes célèbres (Freud, Klein ont font partie) pour lesquels le jeu sert de support au travail psychanalytique.

Le jeu « ne peut plus être considéré comme une activité futile ou uniquement récréative »

Bailly 2001

Apports des jeux dans l’apprentissage 

Le jeu permet de décontextualiser l’apprentissage scolaire, c’est-à-dire de rendre cet apprentissage moins « formel » en ajoutant des éléments informels propices à l’intérêt des élèves. 

Jouer engage et valorise les émotions des joueurs.  Sauvé souligne combien le jeu favorise l’apprentissage, notamment par le rôle que jouent l’engagement personnel et les émotions. 

La motivation crée « des conditions favorables à l’apprentissage et, en ayant un impact positif sur les apprentissages cognitif, affectif et psychomoteur […], le jeu motive l’apprenant, structure et consolide les connaissances, favorise la résolution de problèmes et influence le changement des comportements et des attitudes des jeunes »

(Sauvé et al., 2007)

Comment et dans quelles conditions apprend-on ? 

Quel que soit le support de jeux utilisé (numérique ou physique), la connaissance des processus dits cognitifs plaide pour l’utilisation des jeux en classe. 

Jeux de rôle et improvisations permettent de remettre en cause une vision traditionnelle du cours pour ancrer l’enseignement dans la vie quotidienne et souligner l’importance de l’approche mettant en œuvre une démarche d’investigation.

L’impact du jeu sur l’apprentissage est déterminé par sa jouabilité et son intérêt durable auprès des joueurs.  Le jeu accompagne l’apprentissage et joue un rôle important dans la motivation et le développement des capacités cognitives.

Le jeu peut avoir deux fonctions distinctes : 

Dans les deux cas, il s’inscrit dans une démarche pédagogique réfléchie

Qu’en est-il du rôle de l’enseignant dans l’utilisation d’outils ludiques en classe ?  

La crainte de ne pas pouvoir terminer le programme scolaire ou de perdre son temps expliquerait en partie le fait que les enseignants jouent peu ou pas en classe. 

Ce n’est pourtant pas contradictoire avec l’utilisation du jeu dans la pédagogie. 

En revanche, tous les codes du jeu (règles, décontextualisation, quête, gain…) nécessitent de développer un nouveau rôle pour l’enseignant pour en tirer tous les bénéfices de l’utilisation du jeu dans l’apprentissage.

L’enseignant, le nouveau maître du jeu : cette manière d’enseigner redéfinit du tout au tout le rôle de l’enseignant.

L'AUTEUR :
Manuel Duperthuis Fondateur des Autrement Dit. Issu d’une formation finance et officiant en début de carrière dans des cabinets d’expertise comptable, j’ai eu le souhait de me tourner vers le monde de l’entreprise (Grand groupe industriel et PME). Responsable de services méthodes et organisation dans une grande entreprise publique française, mes équipes multi générationnelles me poussent à renouveler au quotidien mon expérience de manager.
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